Une réflexion sur l’éducation du Chow

Nous tous, quand nous avons eu notre 1er chow, nous nous sommes renseignés sur le caractère de la race, pour savoir si notre mode de vie était compatible.

Une des choses qui m’avait le plus frappée à cette époque était de lire que le chow était un chien têtu, qui ne s’éduquait pas, que le propriétaire du chow ne devait rien attendre de lui et se sentir flatté si son chow daignait l’écouter.

Quelques mois plus tard, mon bébé arrivait à la maison. Puis vint l’adolescence de mon chow. Et le début des ennuis. Aucun rappel, alors que quelques semaines plus tôt le rappel était acquis, les balades devenaient un calvaire parce qu’il tirait comme une brute.

Alors nous sommes allés à un cours d’éducation canine, avec pour but d’apprendre 3 instructions essentielles: la marche en laisse, le rappel et le pas bouger. Mon chow n’a jamais acquis aucun de ces enseignements. Il aurait sans doute pu, avec beaucoup de travail, mais sa nature profonde n’était pas d’apprendre à obéir. J’ai appris à faire avec, à ruser et anticiper pour ne pas avoir à gérer de situation de désobéissance.

On m’a souvent dit que mon chien était idiot parce qu’il n’obéissait pas, mais l’obéissance n’a jamais été une preuve d’intelligence. L’obéissance flatte l’égo du propriétaire de chien, qui a ainsi la certitude de dominer son animal, et de le contrôler: « c’est moi le chef de meute, c’est moi le mâle alpha à la maison ».

Les années passant, je suis devenue famille d’accueil pour l’association, et il a fallu que je m’adapte à de nouveaux chiens dont je ne connaissais pas le passé, les ex-propriétaires ne racontant pas toujours la vérité ou n’ayant pas conscience d’agir mal, et donc de maltraiter leur chow.

J’ai aussi eu besoin de reprendre des cours d’éducation avec une de mes chiennes adoptée adulte, mordeuse. Et mon éducateur m’a posé une question: qu’attendez-vous d’elle? C’est à mon sens la seule question qu’on doit se poser et la seule réponse à avoir à cette question est : RIEN. Il ne faut rien attendre d’un chien et d’un chow en particulier.

Je me suis souvenue de ce que j’avais lu sur le chow avant l’arrivée de mon bébé: le propriétaire doit se sentir flatté si le chow daigne obéir. Et j’ai pris conscience de tout ce que signifiait de vivre avec un chien de race primitive. Les chows ne sont pas différents des autres chiens, ils peuvent parfaitement s’éduquer, ils ont juste des comportements poussés à l’extrême par rapport à leurs congénères d’autres races. Il faut obtenir leur collaboration, et pour obtenir leur collaboration, le propriétaire doit souvent faire la danse du ventre avant que le chow ne daigne s’intéresser à l’activité du maître.

Vouloir faire de son chow un chien obéissant ne fait que le pousser dans ses retranchements, et développer chez lui ce qu’on appelle « la détresse acquise ».

Un ex propriétaire nous a récemment dit en abandonnant son chow mordeur « si j’en reprends un, il faudra qu’il tolère que mes enfants lui tirent la queue sans mordre ». Voilà typiquement un comportement qui illustre la détresse acquise. Quel chien aime qu’on lui tire la queue? Mais pourquoi certains ne réagissent pas? Parce qu’ils ont tellement peur de la réaction des humains qu’ils n’osent plus dire qu’ils souffrent ou que la situation leur est désagréable.
Par ses comportements, au fil du temps, votre chow vous aura signifié qu’il ne veut pas faire ceci ou cela, mais comme vous voulez obtenir LE résultat, vous allez ignorer les signaux d’apaisement qu’il vous adresse (grognements, détournement du regard, fuite, morsure inhibée… ), et votre chien finira par se soumettre à la pression psychologique à laquelle il aura été soumis.
Et un jour, ce chien poussé dans ses retranchements, qui aura adopté des comportements contre sa nature profonde réagira. Et sa réaction sera violente. Et là, vous courrez chez votre vétérinaire pour une euthanasie, ou bien vous vous précipiterez sur votre téléphone pour nous contacter.

Mais nous ne sommes pas des magiciens. Un chien qui a subi des pressions contre nature, afin de démontrer à la société qui était le maître de la maison, un chien à qui on a appris que les signaux d’apaisement qu’il adressait aux humains étaient inutiles, et qu’il valait donc mieux pour lui directement passer au plan B (la morsure) pour avoir la paix, ce chien-là aura toujours des réactions imprévisibles, puisqu’il aura été soumis à un apprentissage intensif durant lequel on l’aura conditionné à ne pas réagir comme un chien mais au contraire à réagir selon le désir de ses maîtres.

Un chien équilibré n’a pas besoin qu’on lui ordonne « assis! » ou « pas bouger! ».  Dès lors, quel intérêt de le faire assoir avant de lui donner une friandise ou sa gamelle, si ce n’est de le faire marroner inutilement?
Idem lorsque nous lui retirons sa gamelle au cours du repas, « parce qu’il doit comprendre que c’est moi le patron, et que ce que je donne je peux le reprendre, et il ne doit pas défendre sa gamelle, parce que si les enfants viennent se servir dedans, il doit le tolérer ».

Par là même, nous créons un comportement de tension du chien vis à vis de la nourriture ou des friandises.

L’équilibre d’une relation humain-chien, c’est d’abord un humain équilibré, qui ne s’emporte pas quand le chien fait une bêtise, qui offre un environnement calme et apaisant à son chien, qui propose la bonne quantité d’exercice au chien (balades, jeux). Et quand il y a cet équilibre, il y a nécessairement la complicité qui se crée, le rappel est naturel, la marche en laisse vient toute seule. En d’autres termes humain équilibré = chien équilibré = relation équilibrée.

Notez bien que nous parlons d’équilibre. Pas de dominance. Ces concepts sont d’une autre époque et leur invalidité a été démontrée scientifiquement.

Ne forcez pas votre chow à se mettre sur le dos pour lui montrer qui est le dominant, parce que vous auriez entendu que dans les meutes de loup, le mâle alpha fait mettre ses subordonnés sur le dos pour les soumettre. C’est faux! Les subordonnés se mettent spontanément sur le dos, pour dire « je ne cherche pas la bagarre ».
Si votre chien se met spontanément sur le dos pour les gratouilles ou le brossage, c’est parfait, mais s’il refuse, ce n’est pas parce qu’il cherche à vous dominer.
Forcer un animal à se mettre sur le dos, c’est le mettre dans une position de vulnérabilité, et lui faire exposer sa jugulaire aux crocs d’un ennemi potentiel. S’il refuse de se mettre dans cette position, c’est qu’il ne se sent pas assez en confiance avec vous, ou encore que la position lui occasionne des douleurs, il ne vous prend pas pour sa femelle ni ne cherche à prendre votre place auprès de votre épouse (discours que nous avons maintes et maintes fois lu et entendu).
Votre chien sait parfaitement que vous êtes un humain et lui un chien, il n’y a pas de confusion dans son esprit.

Aucun éducateur ne pourra faire le boulot à votre place: celui qui vous promet de vous rendre le chien éduqué après quelques séances est un menteur. L’éducation, c’est à vous de la faire, peut-être guidé par un professionnel, mais c’est essentiellement vous qui apprendrez à vous comporter avec votre chien.
Nous avons aussi entendu « l’éducation positive, c’est de la flûte, d’ailleurs ça ne fonctionne pas avec les chows », sorti de la bouche d’un éducateur canin en manque de testostérone, qui voulait sans doute se convaincre qu’il était un dieu vivant parce qu’il avait réussi à caresser un chow.
S’il y a bien un mode d’éducation qui fonctionne avec les races primitives, c’est l’éducation positive, par opposition à l’éducation coercitive. Par la récompense, qui peut être de toute sorte, de la friandise, à la caresse ou le mot doux, vous obtiendrez tout de votre chien. La récompense, c’est ce qui fera de votre chow votre meilleur collaborateur, et la collaboration, c’est le maximum que vous devez attendre de votre chow.
Choisissez votre éducateur canin avec soin, parce que souvenez-vous d’une chose: les dégâts commis en matière d’éducation sont irréversibles.

Et tous les jours, demandez-vous ce que vous attendez de votre chow. De mon chien, je n’attends qu’une chose, le voir heureux.

Pour vos démontrer nos talents d’éducateurs, voici une petite sélection de chows à qui nous avons ordonné: DODO!